On nous pose souvent la question “qu’est-ce que la crise ?”. Mais existe-t-il vraiment une définition unique de la crise ? Quand on cherche une définition de la crise on s’aperçoit assez vite qu’il existe autant de définitions que de pages internet. Le but ici n’est pas d’apporter une nouvelle définition mais plutôt d’approcher ce concept par les caractéristiques communes qui reviennent régulièrement. Expliquer ce que l’on considère comme une “crise” mais aussi comment la préparation et l’entraînement peuvent aider les individus et les organisations à traverser ces évènements.
La notion de crise désigne majoritairement une situation critique et imprévue qui menace la stabilité, le fonctionnement ou la réputation des organisations. La crise se caractérise par une rupture brutale avec l’état normal des choses et nécessite une réaction rapide et efficace pour limiter les dégâts. La notion de crise fait référence à des situations de grande instabilité et de perturbation qui peuvent affecter profondément les individus, les organisations et les sociétés.
Dans la littérature, Patrick Lagadec, chercheur français spécialiste de la gestion de crise, fonde la notion de crise à l’intersection de trois mots : déferlement, dérèglement et rupture. La crise conduit à un dérèglement dans le fonctionnement normal des structures. La crise apparaît violemment et crée une césure brutale dans les habitudes et les modes de fonctionnement d’une organisation ou d’une entité.
Caroline McMullan, professeure à l’université de Dublin et spécialiste dans les notions de gestion et perception du risque définit la crise comme un événement ou une série d’événements qui menacent les objectifs, les opérations et la réputation d’une organisation ou d’une entité. Selon elle, une crise se distingue par son caractère inattendu, son urgence et son potentiel de perturbation significative. Elle met également en avant l’importance de la perception dans la gestion de crise : une situation peut être perçue comme une crise même si elle ne l’est pas objectivement, ce qui influence la réponse des parties prenantes.
Les situations de crise génèrent donc un effet de surprise, plaçant les individus dans l’urgence et nécessitant une prise de décision rapide. Cette urgence demande aux individus de prendre des décisions sous stress dans un environnement incertain et complexe. Une situation de crise va créer ou amplifier certains biais cognitifs individuels ou collectifs au sein des cellules de crise pouvant avoir des conséquences importantes sur la gestion des évènements.
Mais ces définitions permettent elles vraiment de couvrir l’ensemble du spectre d’une crise ? La majorité des auteurs caractérisent la crise par la notion d’urgence. Bien qu’elle soit souvent associée à la crise, elle n’est pas le seul critère déterminant. Une crue majeure illustre bien ce paradoxe : bien qu’elle soit prévisible et progressive, ses conséquences peuvent engendrer une crise en raison de l’ampleur des dégâts, de la perturbation des infrastructures et de l’impact sur les populations. Comme dans beaucoup de cas, la crise ne réside pas forcément dans l’événement en lui-même (la montée des eaux), mais dans la gestion des conséquences, la mobilisation des ressources et la prise de décision sous contrainte. Ainsi, la crise peut être définie non seulement par l’urgence, mais aussi par la complexité de la situation, l’incertitude et la nécessité d’une réponse coordonnée et efficace.
Pour une entreprise ou une institution, les crises peuvent se manifester de différentes manières, chacune ayant des implications spécifiques pour l’organisation. Voici les principaux types de crises auxquels une entreprise ou une institution peut être confrontée :
- Crises sociales (grèves, émeutes, mouvements sociaux, séquestration de dirigeants, blocages de sites de production, suicides, harcèlement, etc.)
- Crises sanitaires (contamination, pandémie, épidémies, etc.)
- Crises informatiques ou d’origine cyber (panne informatique, cyberattaques, défaillance des systèmes industriels, etc.)
- Crises industrielles (explosion, incendie, pollution, etc.)
- Crises terroristes (attaques à main armée, prises d’otages, explosions, etc.)
- Crises opérationnelles (exemples : défaillance de la chaîne d’approvisionnement, problèmes de production, problème métier majeur, etc.)
- Crises liées aux risques naturels (sécheresse, inondation, incendie, tsunami, etc.)
- Crises humanitaires (catastrophes naturelles, conflits armés, etc.)
- Crises de réputation (boycott, critiques des réseaux sociaux, badbuzz, etc.)
- Crises économiques et financières (récessions, faillites d’entreprises, crises bancaires, etc.)
- Crise institutionnelle (exemples : conflit interne, problèmes de gouvernance, etc.)
Cette approche par fait générateur de crise ne permet toutefois pas de parfaitement refléter la complexité des crises d’aujourd’hui. Elle peut être complétée par une approche systémique, ou multifactorielle.
L’approche systémique considère la crise comme le résultat d’une interaction complexe entre plusieurs facteurs. Elle analyse les crises en prenant en compte les interdépendances, les effets en cascade et la dynamique évolutive. Elle est d’autant plus pertinente aujourd’hui que le monde dans lequel nous vivons est plus complexe avec des interconnexions entre différents systèmes (industriels, économiques, sociaux, sanitaires, environnementaux, etc.). Les crises peuvent s’imbriquer et s’amplifier mutuellement. La crise de la COVID-19 a par exemple débuté comme une épidémie locale et s’est transformée en crise sanitaire, économique et sociale mondiale.
La multiplication des crises et leurs imbrications de plus en plus fréquentes incitent plus que jamais les organisations publiques et privées à anticiper la gestion de leurs crises. Cela passe notamment par la planification : la réflexion, en amont de la crise, du dispositif à activer lorsque l’organisation fait face à un événement majeur.
Les crises demandent à chaque organisation une adaptation de leur structure pour pouvoir répondre à des situations exceptionnelles.